Depuis la nuit des temps, les femmes règnent sur leur foyer. Or, s’il y a quelques décennies c’était encore faisable, la réalité d’aujourd’hui est différente. Les femmes travaillent autant que les hommes, n’hésitent pas à mener une vie sociale, à sortir et à prendre soin d’elles. Bref, à vivre belles et épanouies dans toutes les sphères de leur vie.Et si le nombre de nos occupations et responsabilités a augmenté, notre charge de travail à la maison, elle, n’a pas diminué.
Certes, les hommes d’aujourd’hui ne sont pas non plus les mêmes qu’avant. Mais le rôle de parent étant aujourd’hui beaucoup plus exigeant, l’implication de tout le monde est indispensable. Car notre quotidien de maman ressemble un peu à du jonglage. Nos listes de choses à faire sont de plus en plus longues, nos agendas de plus en plus chargés, notre esprit de plus en plus occupé.
N’oublions pas que notre cerveau a des limites. Et plus vous ajoutez d’éléments à votre charge mentale, plus vous courez le risque d’épuisement physique et émotionnel. Notre corps lui-aussi a des capacités limitées. Si vous ne lâchez pas sur certaines responsabilités, si vous oubliez de prendre soin de vous et de votre corps, c’est lui qui vous lâchera à un moment donné. Cela peut se manifester par des signes plus ou moins anodins comme anxiété, manque d’entrain, mauvais sommeil, perte ou au contraire excès d’appétit, ou avoir des conséquences plus graves, telles que : isolement, crises d’angoisse, anorexie ou boulimie, dépression, burn-out.
Un autre argument mérite d’être pris en compte : l’image que votre couple renvoie à vos enfants. Que vous ayez des garçons ou des filles, ils se construisent à travers votre exemple. Si vous avez une fille et que vous vous épuisez à servir les autres de façon presque religieuse, est-ce l’exemple que vous souhaitez lui montrer ? Voudriez-vous la voir dans ce rôle quand elle sera femme et mère ? Or, si vous vous sacrifiez vos besoins au profit des autres, les chances sont fortes que ce modèle devienne pour elle la norme et qu’elle reproduise ce même schéma à l’âge adulte.
Et si vous avez un garçon, quel père de famille voulez-vous qu’il devienne ? Comment voulez-vous qu’il traite sa future femme ou les femmes en général ? Que faites-vous aujourd’hui pour l’aider à développer son autonomie et son sens de responsabilité ? L’enfant regarde et définit son rôle et développe des compétences via l’exemple de ses parents et les apprentissages qu’ils lui offrent. N’oubliez pas que c’est aujourd’hui que vous posez les bases pour vos enfants, qu’elles soient bonnes ou mauvaises.
Un partage équitable des tâches est indispensable pour le bon fonctionnement du foyer et la bonne entente dans le couple. La cohésion familiale est aussi meilleure quand chacun se sent inclus et directement impliqué dans la vie de famille, y compris dans les tâches les moins glorieuses comme la vaisselle ou le ménage.
Ainsi, en tant que mamans, nous n’avons aucune raison pour continuer à assumer tout, toutes seules, et, si l’on regarde cela de plus près, personne n’attend cela de nous. Nos conjoints et nos enfants sont souvent pleins de bonne volonté, mais nombreuses d’entre nous ont encore du mal à céder la place, à faire confiance et à déléguer.
Qu’est-ce qui nous en empêche ?
Tout le monde devrait aimer déléguer, quoi de plus simple et agréable que de déléguer à quelqu’un une partie de son travail ? Et pourtant, la délégation en entreprise comme à la maison n’est pas une mince affaire. Le cerveau humain n’aime pas les changements de routine et d’habitudes, cela génère du stress et de l’incertitude. Pour nous protéger, il nous envoie via une petite voix intérieure des idées qui nous empêchent d’initier les changements et sabotent notre capacité à déléguer.
En voilà quelques-unes :
1/ « Personne ne saura bien faire »
Quand il s’agit de leur famille, les femmes ont tendance à croire qu’elles seules savent faire CE qu’il faut et COMMENT il faut. Et plus elles prennent de choses en charge en devenant indispensables, plus cela les réconforte dans leur certitude. Certaines femmes ont aussi peur de devoir dépenser tant de nerfs et d’énergie à réclamer de l’aide qu’elles préfèrent faire toutes seules. D’autres encore craignent qu’en déléguant elles soient obligées de tout refaire. Oui, il peut être difficile de faire confiance pour les devoirs, le ménage, pour la cuisine, et pourtant, c’est en confiant à notre conjoint ou à nos enfants une partie des tâches qu’on se rend compte qu’on avait sous-estimé leurs capacités.
2/ « Les enfants ont besoin de leur mère »
Oui, c’est une CERTITUDE ! Rien ne peut remplacer l’amour maternel. Une confusion persiste cependant dans l’esprit des mamans qui croient qu’en confiant leurs enfants aux autres, elles les privent d’une partie de leur amour. La réalité est toute autre. Votre amour est toujours là, quoi qu’il arrive, et vos enfants ont besoin d’autres personnes que vous dans leur vie. Rappelez-vous le vieil adage africain : ‘Il faut un village pour élever un enfant’. Les psychologues et les neuroscientifiques (dont le célèbre neuropsychiatre Daniel Siegel qui en parle dans son tout dernier livre ‘The power of showing up’) sont unanimes : il est essentiel pour l’épanouissement et le bon développement d’un enfant de créer des liens avec d’autres adultes que les parents : grands-parents, oncles et tantes, voisins, parents des leurs amis, enseignants, éducateurs, etc.
Si vous avez du mal à confier vos enfants aux autres, dites-vous qu’il n’y a pas UNE seule et unique bonne façon d’éduquer. Et qu’il est bénéfique pour un enfant d’être exposé à plusieurs approches et d’être confronté à plusieurs personnes et caractères différents. Cela rend les enfants plus adaptables, plus malléables et n’affecte en rien leur bien-être et leur amour pour vous.
3/ « C’est mon rôle. J’ai été élevée ainsi, c’est normal. »
Il est temps de se libérer de cette croyance. Nous ne vivons plus à l’époque où les hommes partaient travailler dans les champs pendant que les femmes s’affairaient dans la maison en s’occupant de leur tendre progéniture. Ces temps sont révolus. Outre le fait que la plupart d’entre nous avons aujourd’hui des responsabilités professionnelles en plus des obligations familiales, il est important de se rappeler que les enfants ont aussi besoin dans leur vie d’une présence active d’un père impliqué. Libérez-vous de cette pensée qui veut que vous assumiez tout vous-même, et tout le monde y gagnera.
4/ « Je sais que je peux tout réussir, je n’ai pas besoin d’aide »
En tant que mères, nous avons tendance à placer la barre très haut. S’il y a bien un domaine où nous voulons briller, c’est la famille. Nous nous regardons donc les unes les autres, nous nous comparons, nous doutons de nos capacités et nous culpabilisons si nous n’arrivons pas à atteindre le niveau de perfection que nous nous sommes nous-mêmes fixé. Mais à force de vouloir voler trop haut, nous nous brûlons les ailes et finissons en crise contre nos enfants, nos conjoints et nous-mêmes. Rappelez-vous, c’est vous qui décidez des limites que vous posez aux autres et à vous-mêmes.
5/ « De toute façon, personne ne voudra m’aider »
Encore une croyance qui risque de saboter votre capacité à déléguer. Il y a deux cas de figures possibles ici. Soit vous avez déjà demandé et la personne en face a refusé, soit vous n’avez jamais demandé et cette pensée limitante est le simple fruit de votre imagination.Dans le premier cas, si la personne refuse de vous aider, il est important que vous sachiez communiquer clairement pour que la personne en face sache ce que vous attendez d’elle. Certaines choses au sein du foyer sont non-négociables, le respect et l’entraide entre les époux font pour moi partie du non-négociable.
Pour ce qui est du deuxième cas, certaines femmes pensent que leur partenaire doit littéralement savoir lire sur leur front, c’est-à-dire deviner nos pensées et connaître notre état de stress ou de fatigue. Personne n’en est capable. En outre, votre conjoint peut tout simplement ne pas savoir comment s’y prendre s’il a grandi dans une famille où la répartition des tâches était différente. Ainsi, si vous avez besoin qu’il participe davantage, dîtes-le !
Cette petite voix, nous l’avons toutes. Et il est important d’apprendre à l’écouter et à repérer les messages qu’elle vous envoie. Plus vite vous saurez la reconnaître, moins elle aura d’emprise sur vous et sur vos décisions.
Si malgré tout, vous avez du mal à lâcher prise, voici mes 7 idées pour apprendre progressivement à faire plus confiance aux autres.
1/ Responsabilisez les enfants dès le plus jeune âge
Ce n’est pas un cadeau à leur faire que de les rendre dépendants de vous. D'après les sondages, seuls 23% des enfants participent aujourd'hui aux tâches ménagères contre 82% il y a 25 ans. Rappelez-vous cette règle : vous êtes le guide de vos enfants, pas leur serviteur. Votre responsabilité est de leur transmettre votre savoir-vivre et votre savoir-faire pour les armer pour leur vie. Ces apprentissages sont autant sinon plus importants que le français ou les mathématiques. Responsabilisez les enfants et impliquez-les dans la tenue de la maison dès le plus jeune âge.
2/ Ne supposez rien et briefez tout le monde
De nombreuses femmes supposent par erreur que leur conjoint ne les aide pas par manque d’envie. Elles supposent aussi qu’il devrait savoir lui-même ce qu’il faut et comment il faut faire. Or, votre conjoint a peut-être grandi dans un environnement familial différent et qu’il ne sait tout simplement pas ce qu’il faut faire ou bien n’a pas confiance en ses capacités de réussir ce que vous attendez de lui. Si vous voulez qu’il soit actif et impliqué, rien de plus efficace que de le former comme vous le faites avec vos enfants. Expliquez-lui clairement et pas à pas à cuisiner, à lancer les lessives, à trier le linge, à faire le ménage. Soyez pédagogue, diplomate et patiente. Au final, votre conjoint a les mêmes neurones et les mêmes bras que vous et il est tout aussi capable d’apprendre et de réussir.
3/ Allez-y par petit pas
Commencez par des tâches faciles à déléguer. Demandez à votre conjoint de lancer une lessive de choses qui ne risquent rien, comme les draps ou les serviettes de bain. Aidez vos enfants à apprivoiser le balai, puis l’aspirateur. C’est un apprentissage comme un autre. Commencez par le plus simple, en participant régulièrement tout le monde gagnera en confiance et pourra s’attaquer à des tâches plus complexes.
4/ Communiquez clairement vos attentes et vos besoins
La plupart des tensions en famille proviennent du manque de communication. Nous considérons à tort que les autres savent ce que nous pensons et comment nous allons. Si vous voulez que votre famille prenne en charge une partie du travail, soyez claire avec ce que vous attendez d’eux. Si vous êtes fatiguée, au lieu de ruminer et de bouder, prévenez votre conjoint. Si c’est votre tour de préparer le repas, demandez-lui de vous remplacer. Si vous en avez marre du repassage, discutez avec votre conjoint et demandez-lui de repasser ses affaires lui-même. Apprenez aussi aux enfants à plier et à ranger leurs affaires tout seuls. L’apprentissage de l’autonomie commence dès la naissance, et les parents y jouent un grand rôle.Apprenez à écouter votre corps, à sentir quand trop c’est trop, et communiquez vos besoins et vos attentes de façon claire et franche.
5/ Définissez les rôles
Définissez de façon claire et précise votre fonctionnement familial. A chaque famille de définir le sien. Certaines familles préféreront attribuer les tâches selon la disponibilité de chacun (par exemple, mardi c’est le papa qui prépare le repas car il termine plus tôt, mercredi c’est à la maman car elle ne travaille pas), ou en fonction des préférences. Je connais des familles où c’est toujours la mère qui cuisine, c’est le père en revanche qui lance les lessives au retour du travail. Il est important que chacun connaisse son rôle et les tâches qui sont les siennes.
6/ Instaurez des rituels
Le cerveau humain aime la prévisibilité et la régularité. Les routines nous organisent, structurent nos pensées, cadrent nos comportements. Si vous voulez que tout le monde se sente impliqué et participe de façon régulière, faites-en une habitude. Structurez le quotidien familial de façon la plus précise et prévisible possible. Vous pouvez faire un planning où vous inscrirez les tâches de chacun réparties sur la semaine et l'afficher dans un endroit visible pour tout le monde.
7/ Établissez un plan d’urgence
Rien ne vous empêche de répartir les occupations en fonction de vos préférences (cuisine et aspirateur pour l’un, vaisselle et lessive pour l’autre). Mais il arrivera sûrement des situations où l’un de vous devra assumer le tout. Afin de ne pas perdre la tête sous l’effet du stress, il est important que chacun de vous sache exactement ce qu’il a à faire s’il se retrouve seul à tout gérer : numéros de téléphone, adresses des copains et des lieux des activités des enfants, horaires du début et de la fin de l’école, etc.
Conclusion : Apprendre à déléguer est un apprentissage. Comme pour tout apprentissage, vous aurez besoin de temps et de patience. La délégation est avant tout une affaire de confiance que vous osez accorder aux membres de votre famille. La délégation et l’entraide sont aussi les indicateurs d’une communication franche et de relations saines dans la famille. Si vous vous sentez en forme, si vous sentez que vous pouvez et aimez faire confiance, si vous ne stressez pas lorsque votre réunion finit tard car vous savez que le papa est parfaitement apte à se débrouiller sans vous, alors vous pouvez vous féliciter. Car non seulement votre vie est désormais plus agréable et légère, mais cela montre aussi que la communication dans votre famille est bonne, que tout le monde a sa place, qu’il y règne le respect et la confiance.
Et n’oubliez pas qu’il existe certainement dans votre entourage d’autres personnes pleines de bonne volonté et prêtes à aider. Quel que soit votre environnement social, n’hésitez pas à sortir hors de chez vous pour chercher de l’aide. Les gens sont souvent contents d’aider car c’est un signe de confiance. Vous leur montrez également que si la roue tournait, ils pourraient aussi compter sur votre aide.
Par Elena Goutard, Coach parental
Coach parental, diplômée en psychologie du développement de l’enfant et maman de 4 garçons, Elena Goutard accompagne les familles dans son cabinet et à distance.
Elle aide les parents qui rencontrent des dysfonctionnements dans leur vie familiale, mais également ceux qui aspirent à une vie de famille plus sereine et souhaitent éduquer leurs enfants avec respect et bienveillance.
Elle publie régulièrement des articles sur la parentalité, l’éducation, le développement de l’enfant et de l’adolescent, les émotions et la discipline, les défis de la parentalité à l'ère digitale, le burn-out parental et la charge mentale des parents.
Infos et prise de RDV
Tel : 06 06 53 53 62
email : elena.goutard@gmail.com
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